
- Article issu du numéro 90 – La valse des saisons
Audrey Decaillon interprète la grâce et la gravité des Quatre Saisons de Vivaldi avec une écriture chorégraphique jonglée et dansée de sa composition. Elle évolue, au rythme des saisons, dans une scénographie à l’architecture remarquable accompagnée d’Olivier Soliveret au son et Nicolas Buisson à la lumière. Un spectacle poétique, abondant d’émotions. Rencontre avec l’artiste.1
Enfant, Audrey Decaillon s’était tournée vers le twirling bâton, mais cette pratique aux codes étriqués ne lui convenait pas. C’est à ses 20 ans qu’elle s’est initiée au jonglage et les massues sont aussitôt devenues sa spécialité. À la fin de ses études d’architecte, elle débute sa carrière de jongleuse en Allemagne avant de partir en tournée en Europe. Dès 2011, avec la Compagnie See, elle s’engage à promouvoir le jonglage féminin, encore sous-représenté dans le cirque actuel. Deux ans après, elle est primée et récompensée par le prestigieux Cirque de Demain. Après dix années de pratique autodidacte et de collaborations artistiques prolifiques, avec entre autres la compagnie Jérôme Thomas et Denis Paumier, elle crée un nouveau spectacle seule en scène : XSaisons.
Grandir Autrement : Pourquoi as-tu choisi la thématique des saisons ?
Audrey Decaillon : J’avais envie d’un spectacle qui soit à la jonction du cirque contemporain et de la nature. Je voulais exprimer le temps qui passe et, quand une idée rencontre une musique, le projet émerge. Ici, le rendez-vous était avec Antonio Vivaldi. Ensuite, tout m’a semblé évident. Les saisons évoquent le temps qui passe, la vie cyclique qui, à l’image d’une spirale ascendante, contient en elle une évolution d’année en année. On revient toujours au même point mais toujours un peu plus haut. Par exemple, il y a une réminiscence du printemps dans l’automne et de l’automne dans le printemps, cette continuité est naturelle et c’est ainsi que Vivaldi a composé les saisons. On ne compte que quatre saisons alors qu’il y en a en fait une infinité qui se succèdent. C’est pourquoi j’ai choisi de mettre la variable X devant. D’ailleurs, Nemanja Radulovic, violoniste de génie, a ajouté une cinquième saison à l’œuvre du maître vénitien, en y apportant une dimension japonaise. C’est cette interprétation que j’ai choisie pour la partie du printemps.
En effet, on sent cette touche japonisante dans ton spectacle. Pourquoi ce choix ?
Étant à la recherche d’univers esthétiques assez forts, l’architecture japonaise m’a toujours attirée. Le minimalisme demande une attention de chaque détail. J’ai donc mêlé cette passion à la scénographie. La lumière, l’espace, rien n’est laissé au hasard. J’ai aussi utilisé les matériaux de la construction : des seaux de maçonnerie pour faire écho au continent de plastique et de l’isolant thermique pour représenter le sable. Par […]