Cécile Flé a vécu le chemin difficile pour être mère. Elle a adopté deux garçons et accompagne aujourd’hui les parents adoptants et les enfants adoptés, ainsi que les enfants et parents qui ont des difficultés de relations et les enfants « étiquetés. » Elle anime des groupes de soutien pour les familles sur le chemin de l’adoption. Autrice de plusieurs livres antérieurs à son expérience d’adoption, c’est tout naturellement qu’elle a écrit Créer des liens, Adoption et maternage1, puis Lune après lune2, tous deux parus aux éditions l’Instant Présent.
- Grandir Autrement : Cécile Flé, avant d’aborder ensemble le contenu de votre recueil de nouvelles Lune après lune, pouvez-vous nous parler de la photo qui en illustre la couverture, intitulée « au cœur de l’épaule », dont l’autrice est Leïla Ducos ? Cette photo est très parlante.
Cécile Flé : Oui. Il y a un côté yin et yang dans les courbes. On croit souvent que c’est une femme, mais c’est un homme qui tient le bébé dans ses bras. Je trouvais que ça allait bien avec l’idée de la lune.
- Ce livre est votre premier ouvrage de fiction.
Oui. Un autre est en préparation.
- Et comme de nombreux ouvrages de fiction, il révèle énormément de choses du réel. Comment ce recueil est-il né ? Quelle en a été la genèse ?
J’écoute beaucoup les autres, depuis toujours, et j’écris des bouts d’histoires par-ci, par-là. Petit à petit, ça m’a semblé évident qu’il fallait écrire sur ces sujets autour de la mère, de la maternité, de l’envie d’être mère ou non, du fait d’avoir une mère ou de ne pas en avoir. Pour moi, la relation mère-enfant est vraiment importante. C’est quelque chose que j’ai toujours envie de travailler dans mes accompagnements auprès de mes patients, sur laquelle je m’interroge depuis très longtemps (au travers du maternage proximal, des naissances prématurées, du développement sensoriel in utero, des réflexes primordiaux…). Sans m’en rendre compte au début, et puis, petit à petit, j’ai découvert l’importance que « la mère », et tout ce que ce rôle raconte, avait pour moi. C’est ainsi que ces histoires sont nées. Neuf histoires, comme « neuf mois » pour voir arriver son enfant (neuf mois de grossesse, mais aussi neuf mois pour obtenir l’agrément dans le cadre d’une demande d’adoption). Ce sont des sujets assez tabous. L’avortement est encore mal jugé dans notre société malgré la légalisation depuis quarante-six ans. L’abandon ou l’adoption sont aussi des sujets peu abordés, parce que les gens évitent cette question. Ces questions touchent l’intime, les peurs de chacun et le vécu de nombre d’entre nous. Les émotions liées à ces problématiques sont bien souvent difficiles à dire et à raconter. Comme c’est difficile à raconter, c’est difficile pour beaucoup d’écouter une femme qui parle de sa difficulté d’être mère par […]
La suite de cet article est réservée aux abonné·e·s.