LES CINQ SAISONS

• Article issu du numéro 90 – La valse des saisons

« Les cinq saisons », on dirait une parodie d’un morceau célèbre de Vivaldi ! Ne vous y méprenez pas, ce n’est pas une blague. Les cinq saisons, ça existe bel et bien, et cela nous vient de la médecine chinoise. J’ai eu la joie de le découvrir en m’offrant du temps de qualité pour m’immerger dans une conférence de Marion Arbona de Smilenergy¹.

C’est avec un véritable enthousiasme que j’ai découvert la magie des cinq saisons, selon laquelle chaque saison serait rattachée à un élément, à un organe du corps et, ce qui m’a le plus parlé : à une émotion. Ce fut une mise en lumière d’une bien belle évidence, et cela a changé bien des choses dans mon quotidien et dans mon rapport avec les autres. Marion Arbona nous accompagne pour vivre l’énergie de chaque saison en prenant conscience de celle-ci, tout en s’accompagnant d’exercices de méditation, de respiration et de qi gong afin de rallier la pensée, le souffle et le corps. L’idée est de se réconcilier avec les saisons, leur rythme, d’y prêter attention, d’en tenir compte. Ainsi, nous n’allons plus à contre-sens mais avec. Au lieu de nous culpabiliser, nous acceptons qu’il y ait des hauts et des bas.

Le printemps (Lancer)

Début février, le 4 ou le 5 selon les années, commence le printemps. C’est la saison de l’élément bois, du foie et de la colère. Au printemps, la sève monte. On sent qu’on déborde de projets, d’envies, d’énergie auxquels il est parfois difficile de répondre. C’est une saison durant laquelle nous pouvons nous sentir frustré, limité. Le beau temps (re)faisant surface, c’est l’idéal pour sortir, se mettre en mouvement, s’aérer la tête, défouler sa colère puis respirer pour s’apaiser.

Été (Faire)

Puis jaillit l’été le 6/7 mai avec l’élément feu, le cœur et la joie. En été, il y a les fruits, le soleil. On ressent de la plénitude et l’envie de faire. Il nous tient à cœur de faire les choses. Cependant, veillons à ce que cette joie ne se transforme pas en excitation, en électricité. Permettons-nous d’avoir des temps calmes, de faire des siestes pour ne pas exploser, ne pas nous brûler. Soyons plus détendu. Offrons-nous des temps ensemble, pour ne pas juste se croiser. Allons dehors, nous connecter à la nature, jouer avec la terre, nous connecter à la matière, observer la nature et nous y focaliser. Encore et toujours, prenons soin de respirer.

Automne (Choisir)

L’automne annonce ses premiers signes le 8/9 août avec l’élément métal, les poumons et la tristesse. Le soleil diminue, les couleurs tournent au rouge, les feuilles tombent. C’est le temps du petit coup de « blues de la rentrée », de la pluie, des bottes. La tristesse pointe le bout de son nez, on se sent tiré vers le bas, on se recroqueville. C’est le moment de dire « au revoir » au soleil, à l’été et à tout ce qui va avec, d’en faire le deuil. C’est une merveilleuse invitation à accepter que les choses changent, à lâcher prise. Transformons ces « au revoir » en « merci » pour tout ce que nous avons vécu. Les émotions nous bloquent trop souvent, acceptons cette vague intérieure, vivons-la, laissons-la passer. Accompagnons-la dans le souffle de notre respiration.

Hiver (Se retirer)

Puis le 7/8 novembre, l’hiver s’installe avec l’élément eau, les reins et la peur. Le froid est là, tout devient plus fragile. On se sent comme agressé par cette saison. L’envie et le besoin de repli, de rentrer à l’intérieur, d’être seul·e chez soi avec sa famille se fait sentir. Nous nous sentons plus fatigués, ce qui risque de nous faire voir tout en noir, laissant ainsi les peurs et les angoisses prendre le dessus. C’est le temps du repos. Aérons-nous tout de même, mais pas trop, pas au-delà de nos forces. Nous avons indéniablement besoin d’en faire moins. Ce qui n’est pas toujours facile dans notre société. Faisons des activités calmes, ensemble, en famille, mais aussi seul·e. Respectons notre besoin de solitude, d’être dans notre monde. Ce moment d’introspection, de réflexion est une vraie chance. Nous pouvons prendre le temps de faire le bilan, de formuler nos souhaits pour l’année à venir et de les préparer. Malgré les apparences, en hiver, il ne se passe pas rien : des choses se préparent, doucement, sous la terre, invisibles et subtiles, mais c’est là. L’hiver reste une période essentielle pour le reste de l’année. C’est une période de modération, durant laquelle il est nécessaire d’accepter qu’on ne pourra pas tout faire, qu’il nous faut nous économiser. En respectant tout cela, nous nous protégeons des maladies et devenons notre propre château fort. Finalement, quelle merveilleuse saison que nous vivons ! Prenons le temps de respirer.

Cinquième saison (Transitionner)

« Et alors, cette cinquième saison ? » Il s’agit de l’intersaison. Il est possible que vous trouviez dans certains ouvrages un lien entre l’intersaison et l’été indien, étant tous deux associés à la terre. Cependant, dans le cadre des enseignements de la tradition taoïste Da Xuan, nous allons choisir de nous focaliser sur l’intersaison en tant que période de transition entre deux saisons (dix-huit jours avant chaque saison), période qui revient donc quatre fois par an, cela expliquant qu’il y ait cinq saisons dans l’année, correspondant aux cinq éléments de la médecine traditionnelle chinoise. L’intersaison est la saison de la terre, de la rate et de la rumination. Il y a un besoin de digérer pour accueillir le nouveau. Nous ne sommes plus dans le temps d’avant et pas encore dans le temps d’après. On se sent bloqué, on ressasse, on se fait du souci. On pense en arborescence, sans cesse, et tant qu’à faire, aux choses qui contrarient. Accordons-nous du temps pour observer nos pensées. Pourquoi ne pas fermer les yeux cinq minutes, et sonder notre esprit pour connaître nos pensées ? Par la suite, on peut les partager, les écrire. On réalise qu’on se dit des trucs pas toujours sympas. Attention à ce que nous nous racontons car nous nous écoutons ! Une fois que nous avons identifié nos pensées, nous pouvons choisir de ne pas les écouter, encore mieux, d’en rigoler ! « Tu radotes ma vieille ! » Prenons ce temps pour accepter ce que nous ressentons, pour reprendre confiance. N’oublions pas : l’avantage avec le soleil (comme le bonheur) c’est que ça revient. « Il fait toujours beau au-dessus des nuages. »

Les cycles

Nous vivons tous plusieurs cycles. Il y a le cycle menstruel, de la lune, du soleil, de la journée, des saisons, de l’année, de la vie. Tout est affaire de cycle. Une fois un cycle fini, un nouveau commence. La fin appelle le renouveau. Chaque phase d’un cycle a des impacts sur la suivante. Plus nous vivons « en phase » avec chacune de ces étapes, même (et surtout) les moins agréables, mieux nous vivrons les suivantes. Certains cycles sont intimement liés (exemple : les quatre phases du cycle menstruel, du cycle de la lune et des quatre saisons), tous s’imbriquent les uns dans les autres. Nous vivons plusieurs cycles simultanément. En médecine chinoise, nous prêtons également attention à nos saisons intérieures. Nous vivons tous des événements particuliers, et ce, peu importe la saison. Il y a incontestablement des cycles dans les cycles. Comme par exemple un deuil en plein été. Dans ce cas, nous pouvons adapter les exercices pour nos saisons personnelles. Le tout étant finalement de prendre connaissance de nos propres cycles, de nos propres rythmes à un temps T, de les accepter et de les intégrer dans notre vie quotidienne, dans la gestion de notre énergie, ce qui ne peut qu’être source naturelle de bien-être (voire d’inspiration) pour tout l’écosystème familial qui nous entoure.

Pour aller plus loin

Mes cartes Qi Gong, Éditions Grancher (2021).