
On est les champions ! On est les Champions ! On est… On est… On est les Champions !
Ben quoi ? Je sais, je sais… la coupe du monde manque d’elle ; mais, mon couple à moi aussi ; et cela depuis belle lurette.
Pourquoi alors ne pas parler foot, passement de jambes, retourné acrobatique, petit, grand-pont ou belle lucarne. Hein ? Pourquoi donc ? Ben… tout simplement, parce que je n’y connais rien en foot. Pas plus en tout cas qu’en matière de couple. Le couple d’ailleurs, c’est quoi au juste ? Et selon quelle acception ? Pour en être sûr, j’ai cherché à l’aveugle dans le dictionnaire, et dans le Larousse en ligne, j’ai trouvé ceci : « Système de deux forces de somme nulle, caractérisé par son moment. » Euh… du coup, j’ai regardé par la fenêtre. Là, coulent le Lez et mes amours. « Faut-il qu’il m’en souvienne ? » Est-ce la peine de remembrer un passé disloqué ? Était-ce un jour, ou bien une nuit ? Le crépuscule des idoles ? Le chien-loup ? Je ne sais plus. Il faisait sombre. Les couleurs singulières changent lorsqu’elles sont plurielles. Quoiqu’il en soit, même si mon couple date, le fruit de notre amour passé est toujours un présent pour le futur.
Une seconde d’éternité… la vie !
Attendez ! Je me replonge. Je me rappelle. Je me remémore. Ah, voilà ! Juste avant que celle que j’appelle dorénavant « ma commère » perde les eaux, je m’étais décarcassé à bicyclette à chercher dans toutes les boulangeries et épiceries du coin un Mister Freeze pour pallier sa fringale de fin de seins de glace. Ce n’était pas de saison me disait-on. Peu importe, quand vient la nuit et « que sonne l’heure », que je crève si je demeure. C’est dans un bar-tabac que j’ai finalement déniché ce bâton glacé. Une fois trouvé, j’ai rapporté le trophée à la fraise que la future maman a savouré. Ensuite, comme par enchantement, le déluge fut déclenché. Nous prîmes à l’arrache un couple de vêtements pour filer à la clinique, au cas où cela se (re)produirait et qu’il faudrait des changes ou des langes. Il y avait des grenouillères, des kangourous, de l’angora, de la laine, du cuir, du vair, du croco. Sur la route, nous n’avons pas croisé de végane. Hosanna ! Une fois arrivés à la clinique, le fruit de nos entrailles ne daigna pas sortir. Nous y passâmes donc la nuit ; elle dans un lit, moi dans un fauteuil des années 80. Le lendemain, rien jusqu’au soir où je m’endormis comme un loir dans un lit d’appoint. Et là, alors que je rêvais de l’on ne sait quoi, on me réveilla. L’heure de gloire était arrivée. En salle de travail, nous nous tînmes la main. On mit un fauteuil sous moi pour éviter que je me casse le coccyx car je chancelais. Cela fut poussif. Le temps se dilatait. Puis… puis, je la vis. Je vis notre fruit éclore (ma commère porte un nom de fleur). Je n’ai pas coupé le cordon ombilical entre ma fille et sa mère, je ne le regrette pas. Une sage-femme s’en est chargée. Alors, je l’ai prise dans le creux de mes bras. Je l’ai emmenée dans une autre salle d’un pas assuré et rassurant. Je l’ai regardée, contemplée. J’ai pleuré, religieusement. Je l’ai nettoyée. Je l’ai vêtue. Je lui ai souri. Je lui ai parlé. Elle me tenait l’index. Je l’ai rapportée à sa mère. C’était beau. C’est la vie. La vie vibrante qui vivifie. Il me semble que ce fut l’acmé de notre couple. Nous nous étions accouplés pour enfanter ce trésor qui nous unissait pour une seconde d’éternité. C’était beau. C’est la vie.
Depuis, la mère de ma fille et moi, nous ne sommes plus en couple. Pourquoi ? Parce que. C’est moche ; c’est la vie. Nous nous sommes manqués et notre enfant nous manque une semaine sur deux. Toutefois, je pense que ma fille le vit assez bien. Elle est radieuse. Elle en tire même des avantages. Elle a deux fois plus de cadeaux pour Noël et son anniversaire. Elle mange chez l’un ce qu’elle ne goûte pas chez l’autre. Elle a trois chats et des fringues, des conseils et des câlins en veux-tu en voilà. Elle est épanouie et parfume l’atmosphère quand elle rit de bon cœur.
Malgré tout, les photos préférées de Louise sont sans conteste celles où nous figurons tous les trois.